Ce mois de mars voit le 4e centenaire de la naissance de SAVINIEN DE CYRANO DE BERGERAC – le véritable Cyrano, et non le personnage au grand nez d’Edmond Rostand. Cyrano n’était ni gascon ni mousquetaire, mais il est exact qu’il mourut à trente-cinq ans des suites d’un mystérieux coup porté à la tête, dans des circonstances toujours mal éclaircies aujourd’hui.
Les années 1970-80 ont vu la reconnaissance de L’Autre Monde, voyage imaginaire où éclate le génie inventif et critique de Cyrano, mais on ignore souvent qu’il fut aussi auteur de théâtre. Molière doit pourtant beaucoup à son unique comédie: Le Pédant joué. Son unique tragédie, La Mort d’Agrippine, est une pièce sans équivalent dans le théâtre classique français, dont Pierre Brun disait dès 1893 (Cyrano de Bergerac) : « Tous étaient d’avis, et c’est aussi l’opinion de M. Mounet-Sully, que Cyrano méritait à son époque, comme auteur tragique, une place d’honneur à côté de Corneille, et que la reprise d’une pièce de n’importe lequel de ses contemporains n’aurait obtenu pareil succès ». Mais « la critique orthodoxe rejeta le chef-d’œuvre du rang qu’il méritait d’occuper, qu’il mérite aujourd’hui de reprendre » (Antoine Adam, Histoire de la littérature française au XVIIe siècle). Cyrano de Bergerac propose avec La Mort Agrippine une méditation sur l’histoire romaine qui tend un miroir politique à la période troublée de la Fronde, et qui problématise les fondements de la légitimité monarchique. Les passions qui s’y déchaînent incluent aussi une passion de la langue, qui prend son origine dans un dialogue permanent avec le latin.
L’édition établie par Françoise Gomez, qui paraît au Livre de Poche ce 13 mars, met particulièrement en lumière ce point. Au même moment, la pièce se joue au Déjazet, dans une mise en scène de Daniel Mesguich, du 13 mars au 20 avril.
Trois rencontres organisées pour l’académie de Paris, d’accès libre et distinct, scanderont cette résurrection dramatique…

- Vendredi 15 mars, à l’ENS, de 14h à 17h, ouverture exceptionnelle du séminaire de Jean-Charles Darmon : « Figures du Libertinage », avec Daniel Mesguich.
- Mercredi 20 mars de 14h30 à 17h30, Lycée Paul Bert (rue Huyghens, métro Vavin): « Anabase de Cyrano : ou la lente remontée de l’auteur Cyrano de Bergerac à la mémoire collective». Avec Daniel Mesguich, Daniel Loayza, Jean-Charles Darmon et Françoise Gomez.
- Samedi 6 avril de 9h30 à 12h30, au Lycée Paul Bert, master-class de Daniel Mesguich sur l’alexandrin classique, de Cyrano à Racine.
Inscription indispensable, auprès de francoise.gomez@ac-paris.fr.
